Le Golfe ne fait qu'un, mais chaque rive a sa propre histoire.
- Alaa Tamimi
- 18 mai
- 3 min de lecture

Au milieu des méandres de l’histoire et des conflits du présent, le Golfe est disputé sur les noms, tout comme les nations le sont sur lui. Pour les Arabes, c’est le « Golfe Arabique », et pour les Iraniens, c’est le « Golfe Persique », mais au fond, il reste le témoin des changements du temps et des luttes de pouvoir.
D'une superficie de 251 000 km² et d'une profondeur moyenne de 50 mètres, ce bras marin s'étend du Chatt al-Arab au nord jusqu'à la mer d'Arabie au sud, portant en lui des richesses qui en ont fait le « cœur énergétique mondial ». Il est entouré par l’Iran et sept pays arabes, chacun avec sa propre histoire, ses propres droits et ses propres intérêts.
Les Sumériens l'appelaient la « Mer de la Terre de Dieu », puis la « Grande Mer du Lever du Soleil », avant qu'Alexandre le Grand ne la nomme « Mer Persique » au IVe siècle avant J.-C. Les Arabes l’appelaient le « Golfe de Bassorah » et le « Golfe d’Oman ». Les géographes musulmans tels qu’al-Hamawi et al-Dhahabi ont même utilisé les deux noms dans leurs écrits. En Occident, les cartes européennes adoptèrent le nom persan, tandis que les anciens Romains l’appelaient le « golfe Arabique ».
Le récit iranien considère le « Golfe Persique » comme le seul nom reconnu internationalement et s’y réfère comme une identité nationale. Ils célèbrent même chaque année la « Journée nationale du Golfe Persique ».
Le récit arabe confirme que le nom arabe est ancien et reflète une réalité démographique et géographique, où les tribus arabes s'étendent des deux côtés jusqu'à la côte iranienne.
Au milieu de cette tension, le président américain Donald Trump a officiellement introduit le terme « Golfe Arabique », une démarche non dénuée de connotations politiques et source de nouvelles discordes entre les pays de la région et l’Iran. Dans un monde où la géopolitique est en conflit, les étiquettes restent un outil d’hégémonie. Mais l’histoire nous rappelle que les mers ne sont pas possédées, elles sont partagées. La mer que les Perses appelaient « Perse » et que les Arabes appelaient « Arabique » est la même mer qui a été témoin d’une coexistence commerciale et culturelle pendant des milliers d’années.
En effet, la multiplicité des noms pour les mêmes cours d’eau n’est pas un phénomène exceptionnel ; La Manche, qui sépare la France et la Grande-Bretagne, est connue en Grande-Bretagne sous le nom de Manche. Il en va de même pour la mer du Japon, que la Russie appelle la mer de l'Est, et que la Corée appelle la mer de l'Est de Corée. Ces exemples nous rappellent qu’un nom reflète parfois une perspective, et non une vérité absolue, et que la reconnaissance mutuelle ne se construit pas sur des mots mais sur des compréhensions.
Tout comme les différentes mers ont eu de nombreux noms à travers les âges – de la mer de Qulzum à la mer Rouge, de la mer Caspienne à la mer Caspienne – le Golfe, aux yeux des sages, restera un symbole de connexion, et non de division. Au lieu de transformer le Golfe en une arène de conflit, les pays riverains devraient s’inspirer de son histoire commune comme voie de coopération, car la richesse n’est pas protégée par la rhétorique, mais par la sagesse.
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